samedi 22 juin 2019

Les voitures 51 à 60 et l'effectif du matériel roulant des Tramways Bruxellois entre 1875 et 1880 ^^


Selon une note manuscrite d'Albert Jacquet, l'effectif du matériel roulant des Tramways Bruxellois au 31.12.1875, soit 105 voitures, est le suivant:
- 26 voitures à impériale provenant de la compagnie Morris, numérotées de 1 à 26;
- 42 voitures à 14 places assises provenant de la compagnie Vaucamps, numérotées de 101 à 142;
- 19 voitures à 16 places assises, de la même provenance, numérotées de 181 à 199;
- 3 petites voitures à 12 places assises, de la même provenance, numérotées de 203 à 205;
- 1 voitures ouverte à 5 bancs, de la même provenance, numérotée 200;
- 4 voitures de grande capacité, de la même provenance, numérotées 311 à 314;
- 10 voitures fabriquées à Nivelle de type "Ville de Lille", construites pour les Tramways Bruxellois et numérotées de 51 à 60, dont il sera question par après.





Toujours selon Albert Jacquet, l'effectif de la compagnie des Tramways évolue ensuite comme suit:
En 1876, 10 voitures ouvertes (n°91 à 100), destinées à la ligne de Schaerbeek au Bois de la Cambre, furent fournies par les ateliers de Nivelles, qui construisirent également, la même année, les petites voitures fermées à 12 places assises n°201 et 202 mise en service sur la ligne d'Uccle.

D'après les documents officiels de la société, l'effectif du matériel roulant était, en 1876, de 116 véhicules, une des petites voitures Vaucamps 203-205 ayant été retirée du service et démolie.

En 1877, le nombre total des voitures était de 136, 20 nouvelles voitures ouvertes à 7 bancs, n°71 à 90, ayant été fournies pour les ateliers de Nivelles. Ces voitures furent affectées à la ligne du Bois, en remplacement des premières voitures ouvertes à 7 bancs n°91 à 100 qui desservirent la ligne Laeken-Midi avec attelage à un cheval.
En 1879, l'effectif des voitures est ramené à 135 unités par suite de la démolition d'une des voitures 203-205. En revanche, la société achète aux ateliers de Nivelles la voiture fermée n°61 et passe commande pour 5 véhicules fermés n°46 à 50, fournis la même année.
En 1880, à la suite de la reprise par les Tramways Bruxelles des sociétés Becquet (40 voitures pour la compagnie Brésilienne + 14 voitures pour les tramways d'Ixelles-Etterbeek) et d'une nouvelle commande de 25 voitures fermées à la Métallurgique, l'effectif du matériel roulant se trouve portée à 221 unités.


Pour en revenir aux voitures 51 à 60, voici ce qu'en dit Albert Jacquet:
En 1875, peu après la constitution de la société des Tramways Bruxellois, les nouveaux exploitant expérimentèrent sur la ligne de Schaerbeek au Bois de la Cambre une voiture construite par la société Métallurgique et Charbonnière belge dans ses ateliers de Nivelles pour la compagnie des Tramways du Département du Nord, réseau de Lille, où elle portait le n°31.








Ce véhicule, d'un modèle nouveau, obtint du succès auprès du public. Plus spacieuse et confortable que les types américains employés jusqu'alors par les différentes compagnies exploitant le réseau de tramways de Bruxelles, cette voiture, connue à cette époque sous le nom de "Ville de Lille", différait des modèles précédents par son châssis entièrement métallique, composé de longerons en tôle découpée assemblés par des fer profilés.
La suspension par barillets en caoutchouc, employée jusqu'alors, était remplacée par des ressorts à lame fixe sous les boîtes à huile. Les plates-formes étaient de très grandes dimensions, avec des gardes-corps élevés et des colonnes de support de toiture.
La caisse comportait deux compartiments, l'un de première classe, à 6 places et l'autre de seconde classe, à 10 places, séparés par une cloison à portes roulante. La disposition était donc dissymétrique, contrairement à l'usage adopté jusque là à Bruxelles. Les baies de custode, au nombre de 3 de chaque côté, étaient garnies de glaces dormantes, la glace du milieu présentant la moitié de la largeur des glaces des extrémités. La garniture du compartiment de 1ère classe comportait des coussins en velours rouge avec dossier. Celle du compartiment de seconde classe était de drap gris clair.
Le pavillon, peu incurvé, présentait un lanterneau avec petits châssis pivotants pour la ventilation. Des rideaux en coutil gris préservaient les voyageurs des rayons du soleil. Malgré son poids, notablement plus élevé que celui des voitures du type américain, cette voiture donna satisfaction au public et à la compagnie.
Cette dernière commande aux ateliers de Nivelles 10 voitures entièrement semblable à la "Ville de Lille", qui furent livrées dans le courant de l'année 1875 et mises en service sur la ligne de Schaerbeek au Bois de la Cambre, où elles remplacèrent un nombre équivalent de voitures Morris à impériale.


Nous allons interrompre ici le texte d'Albert Jacquet afin de préciser le contexte de la "commande" dont il est question. Le fait que les Tramways Bruxellois aient testé une voiture destinée au réseau de Lille et produite par la société Métallurgique et Charbonnière belge n'est évidemment pas du au hasard: en 1875, ces trois sociétés sont toutes les trois la propriétés de l'homme d'affaire Simon Philippart.

Son holding, les Bassins Houillers du Hainaut, est en grande difficulté financière et au bord de la faillite, ce qui explique l'autre version de cette "commande". Les tramways de Lille ont commandé 30 voitures. Après les premières livraisons, ils réalisent que ces voitures correspondent pas totalement à ce qu'ils attendent et souhaitent donc s'en débarrasser. Ils proposent donc aux Tramways Bruxellois de reprendre une partie de la commande non encore livrée (soit 20 voitures) à un prix très intéressant, et leur prêtent même une voiture pour essai. Cela ne pose évidemment pas de problème vu que ces deux compagnies font partie du même "holding". Cependant, pour des raisons inconnues, l'accord final ne semble avoir porté que sur 10 voitures.




Reprenons maintenant la lecture du texte d'Albert Jacquet:
En 1876, la voiture 60 est affecté, en tant que remorque, aux essais de traction vapeur qui s'effectuent sur la ligne du Bois de la Cambre, à l'aide d'une locomotive Tubize.


En 1885, les voitures n°51 à 60 subirent une première transformation, consistant à mettre au centre de la caisse la cloison séparant la première classe de la seconde, de façon à avoir chaque compartiment présentant le même nombre de places assises, avec 8 voyageurs en première classe et 8 voyageurs en seconde. La différence entre les deux classes n'était marquée que par de simples coussins mobiles en velours rouge que l'on pouvait passer d'un compartiment à l'autre, à chaque terminus, de façon à avoir toujours la première classe à l'arrière, selon la règle adopté par les Tramways Bruxellois.
Les écriteaux latéraux indicateurs de parcours furent supprimés ainsi que certains ornements, tels que les motifs en feuille d'acanthe des angles de soubassement des caisses et les lambrequins bordant les toitures des plates-formes.
Par la suite de l'installation de la cloison de séparation au centre de la caisse, la disposition des baies de custodes fut modifiée. De chaque côté, 4 glaces dormantes égales remplacèrent les 3 glaces primitives. Ainsi transformées, les voitures 51 à 60 servirent de prototype aux voitures construites ultérieurement dans les ateliers des Tramways Bruxellois.

En 1887-1888, les voitures n°51 à 54, 57, 58 et 60 furent aménagées en vue de leur transformation en motrices électriques par accumulateurs selon le système Julien.

La voiture électrique 53 circulant lors de l'exposition de 1888 sur la ligne Exposition - Impasse du Parc
La gravure est issue du Patriote Illustré paru le 6 janvier 1889.

Les caisses furent placées sur des châssis moteurs et l'emplacement situé sous les banquettes fut disposé pour recevoir les batteries d'accumulateurs. Le soubassement fut muni de portes rabattantes pour la mise en place des batteries.



La voiture n°59 a été vendue en 1888 à Monsieur Julien, qui l'a transformée en voiture motrice à accumulateurs pour l'Amérique du Sud, tandis que les voitures 55 et 56 font office de voiture-aubette durant quelques temps.
La voiture 55, faisant office de voiture-aubette

Lorsque, en 1889, la société des Tramways Bruxellois renonce à l'emploi de la traction électrique par accumulateurs, ces voitures furent remises en état pour la traction par chevaux. Les anciens longerons en tôle découpée, type Nivelles, ne furent plus utilisés. On les remplaça par des plaques à garde du système américain, avec ressorts à boudin, du type adopté par les Tramways Bruxellois pour toutes les voitures fermées de construction nouvelle.

En 1894, quand furent électrifiées les lignes d'Uccle et des boulevards du haut de la ville, les voitures précitées furent de nouveau converties en motrices. Aucun changement ne fut apporté aux caisses, qui furent simplement adaptées aux trucks moteurs.

Enfin, lors de la conversion en remorques des anciennes motrices à 16 places assises primitivement utilisées sur le réseau, les voitures 51 à 54, 57, 58 et 60 subirent une nouvelle transformation. Les caisses furent placés sur des châssis formés d'un treillis en fers profilés, avec ressorts à boudins, d'un modèle créé par la Métallurgique. La longueur des plates-formes munies de cloisons vitrées, des rampes d'appui au bas des marchepieds et d'une colonne médiane, fut portée à 1,6 mètres, ce qui permit d'obtenir une capacité de 43 places dont 16 assises, sans surcharge. Ces remorques, qui étaient toujours en service en 1931, ont été équipées entre-temps du frein Westinghouse.


Bon weekend,

Callisto


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