1897 : Les travaux
d’électrification, par alimentation souterraine, de la ligne « Schaerbeek – Bois » battent leur
plein. La ligne a été divisée en sections de 200 mètres environs, et le travail
est parfois conduit simultanément sur une dizaine de sections en même temps,
par un millier d’ouvriers. Les travaux demandent un délai de 5 à 6 semaines,
pendant lesquels les tramways hippomobiles circulent sur une voie volante posée
directement sur la chaussée, et là ou cela n’est pas possible, sur une voie
provisoire ordinaire, établie dans la chaussée même.
L’électrification du réseau des
Tramways Bruxellois avait cependant commencé en 1894, sur la ligne des
boulevards circulaires du haut de la Ville, avec la mise en place d’une ligne
aérienne permettant la traction par conducteur aérien dite « à trolley ». Si le public fut plus
qu’enthousiaste et prit littéralement d’assaut les nouvelles motrices
électriques, nombreux furent ceux qui se reprochèrent à la ligne aérienne de
n’être qu’une « horrible toile
d’araignée » qui gâchait l’esthétique des belles avenues bruxelloises.
Le Collège des Bourgmestre et
Echevins de la Ville de Bruxelles forcèrent donc la main aux Tramways
Bruxellois, en les obligeant à établir un système de prise de courant par le sol,
système testé (et adopté) par les tramways de Budapest, en 1886. Il s’agissait
d’une alimentation électrique par caniveaux : deux rails souterrains (un
« pôle positif » et un
« pôle négatif ») étaient
posés sous la voie ; tandis que les motrices se voyaient équipées de
charrues qui, plongées dans la fente de 3 centimètres qui séparaient les deux
« demi-rails » de la voie,
faisait office de connecteur et permettait l’alimentation électrique.
Cette structure métallique lourde
et au fonctionnement complexe, était horriblement onéreuse à installer… et à
entretenir. Les caniveaux devaient en effet faire l’objet d’une surveillance
constante, pour qu’aucun obstacle ne puisse entraver le glissement de la
charrue. Les aiguillages (et les traversées de voies) étaient les « points faibles » de ce
dispositif : non seulement les roues pouvaient s’engager dans l’aiguillage
et s’y caler, mais de plus, les charrues s’accrochaient aisément dans les
aiguillages et amenaient, indépendamment d’une détérioration qui exigeait la
rentrée de la voiture aux ateliers, des interruptions de service très
préjudiciables à la bonne exploitation du service.
Pour remédier à ces problèmes, un
système de nettoyage journalier des caniveaux fut mis en place. Quant aux
aiguillages, ils furent mis sous la surveillance d’un « agent-aiguilleur », un métier peu
connu, mais dont nous retrouvons la trace dans les anciens avis de services des
Tramways Bruxellois, conservés au service de Documentation & Archives du Musée du Transport urbain bruxellois:
Les Tramways Bruxellois
Voies & Travaux
N° 23
Avis
Des accidents arrivant encore fréquemment aux charrues des voitures
électriques et aux aiguilles des lignes à caniveaux souterrains, par suite de
la négligence des agents aiguilleurs, nous leur rappelons l’avis paru en date
du 2 juin 1898 et ainsi conçu :
Les aiguilleurs se retrouveront le matin à le à leur poste, à l’heure
indiquée sur leur tableau de service, les heures devançant de quelques minutes
le passage des premiers trains, il leur est recommandé d’employer ce temps au
nettoyage de leurs aiguilles et à la vérification de leur bon fonctionnement.
Il leur est défendu pendant toute la durée de leur service, de s’asseoir à l’intérieur des aubettes ou voitures à proximité de leur poste.
Il leur est défendu pendant toute la durée de leur service, de s’asseoir à l’intérieur des aubettes ou voitures à proximité de leur poste.
Ils se tiendront, tout le temps, à côté des appareils qu’ils sont chargés
de manœuvrer.
Ils s’assureront, pour le passage de chaque train, de la
position normale des aiguilles.
Ils s’abstiendront de causer, de lire, ou de fumer, en un mot de
s’occuper de tout ce qui est nature à les distraire.
Ils auront soin en faisant usage d’huile, graisses, chiffons, etc… pour
l’entretien des appareils de ne pas salir la voie publique, les trottoirs et
particulièrement les immeubles (maisons ou aubettes) dans le voisinage de leur
poste.
Ils seront toujours en tenue réglementaire.
Pour toute infraction commise au présent avis, les agents fautifs
seront l’objet de peines très sévères.
Bruxelles le 7 octobre 1899
L’Ingénieur Chef du Service des Voies et Travaux,
Edmond Dugniolle
On notera que, depuis le 27
février 1898, les agent-aiguilleurs desservant les lignes à caniveaux
souterrains n’ayant pas, de leur faute, occasionné d’accident aux charrues ou
aux aiguilles, étaient gratifiés d’une prime calculée sur base de 0.05 francs
par jour de présence sur les lignes à caniveaux souterrains.
Leurs conditions de travail sont pénibles. On peut ainsi lire, dans le journal "Le Vingtième Siècle" du 30 janvier 1898: "La compagnie des Tramways Bruxellois vient de prendre une excellente mesure en faveur des aiguilleurs qui, jusqu'ici, passaient les heures de la journée aux croisement des voies, exposés à toutes les intempéries. Un modèle d'abri a été soumis par la compagnie à l'administration communale et a récemment été approuvé par elle.
Sous peu, donc, les aiguilleurs des Tramways Bruxellois auront, pour se garantir, une guérite mobile du genre de celles que l'on rencontre au bord de la mer, recouverte de toile imperméable. De plus, les aiguilleurs recevront de vastes paletots en étoffe chaude, des cabans en cuir et des pèlerines en fourrure.
Il faut espérer que les autres sociétés de tramways qui emploient des aiguilleurs s'inspireront de l'exemple que leur donne la compagnie des Tramways Bruxellois."
Leurs conditions de travail sont pénibles. On peut ainsi lire, dans le journal "Le Vingtième Siècle" du 30 janvier 1898: "La compagnie des Tramways Bruxellois vient de prendre une excellente mesure en faveur des aiguilleurs qui, jusqu'ici, passaient les heures de la journée aux croisement des voies, exposés à toutes les intempéries. Un modèle d'abri a été soumis par la compagnie à l'administration communale et a récemment été approuvé par elle.
Sous peu, donc, les aiguilleurs des Tramways Bruxellois auront, pour se garantir, une guérite mobile du genre de celles que l'on rencontre au bord de la mer, recouverte de toile imperméable. De plus, les aiguilleurs recevront de vastes paletots en étoffe chaude, des cabans en cuir et des pèlerines en fourrure.
Il faut espérer que les autres sociétés de tramways qui emploient des aiguilleurs s'inspireront de l'exemple que leur donne la compagnie des Tramways Bruxellois."
L’on notera aussi que, rien que
sur la ligne « Schaerbeek – Bois »,
dont les travaux d’électrification furent terminés le 11 septembre 1897, on ne
dénombrait « que » 35
croisement simples et 72 aiguilles. L’on comprendra aisément que, malgré les
précautions prises par la direction des Tramways Bruxellois, ce système de
prise de courant par caniveaux engendra beaucoup de pannes et donna du souci à
bon nombre d’aiguilleurs et de conducteurs.
Un billet de tram de la ligne "Schaerbeek - Bois", d'avant 1899 |
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