jeudi 15 décembre 2016

Léon Janssen, directeur et administrateur général des Tramways Bruxellois de 1888 à 1921 ^^

Je vous propose, dans cet article, de retracer la biographie d'une figure marquante du monde économique de la « Belle-Epoque », à savoir le Baron Léon Janssen, qui fut directeur et administrateur général de la société anonyme des Tramways Bruxellois, de 1888 à 1921.


Buste du Baron Léon Janssen, gravé avec la mention:
"L'Union internationale de tramways et de chemins de fer d’intérêt local,
à son Président le Baron Janssen – septembre 1910"


Gérard Hubert Léon Janssen nait le 21 mars 1849 à Maastricht. Il fait partie de la fratrie de 5 enfants qu’eurent Gustave Janssen (1825-1910) et Isabelle Neven (1827-1901). La famille quitte Maastricht pour venir s’installer à Bruxelles en 1853. Il entre en 1866 (à l’âge de 17 ans, donc) à l’Ecole Royale Militaire et termine ses études d’officier le 6 octobre 1868.



Dans les cercles mondains qu’il fréquente, il rencontre Caroline Bourgeois (la fille du notaire Auguste Bourgeois et petite-fille de Balthazar Bourgeois, l’un des plus éminents magistrats du 19ème siècle) dont les sentiments à son égard sont réciproques. Malheureusement, Auguste estime ce projet de mariage prématuré. Léon décide alors de quitter l’armée et de voyager. Au retour d’un long périple en Amérique et au Proche Orient, il obtient enfin la main de Caroline, qu’il épouse le 29 janvier 1872 à l’âge de 23 ans.



Vraisemblablement grâce aux relations de son beau-père, il devient secrétaire (et puis directeur) de la société créée par la Compagnie Immobilière de Belgique pour la mise en valeur du Quartier Notre Dame aux Neiges à Bruxelles. Il s’agit d’un ancien quartier ouvrier, nommé ainsi suite à une apparition de la Vierge Marie qui aurait provoqué une chute de neige en plein mois d’août. Le quartier est rasé en 1874 sous prétexte d’assainissement et de nouvelles artères sont créées, sur base des plans de l’architecte Antoine Mennessier, afin de laisser place à l’actuel quartier des Libertés (où chacune des quatre libertés constitutionnelles de l’époque a sa rue : la Presse, les Cultes, l’Association et l’Enseignement).



La Direction de la Société Générale de Belgique apprécie l’énergie et la compétence de Léon dans les affaires immobilières qu’elle patronne, par l’intermédiaire de la CIB, dans le quartier Notre Dame aux Neiges, ainsi que son dynamisme à défendre les intérêts de la Société Générale dans la modernisation de Bruxelles. C’est ainsi, qu’en 1888, elle fait entrer Léon à la direction de la Société Anonyme des Tramways Bruxellois, dont la Société Générale avait pris le contrôle quelques années plus tôt.



C’est en grande partie sous l’impulsion de Léon que la compagnie des Tramways Bruxellois connait une expansion sans précédent : outre l’électrification du réseau et la desserte des quartiers suburbains, on peut également retenir qu’il parvint à acquérir l'unification temporaire de plusieurs réseaux de tramways électriques à Bruxelles en 1899, au profit des Tramways Bruxellois et, indirectement, de la Société Générale !



Ses succès dans les affaires de tramways lui valent d’ailleurs l’accès à la présidence de l’Union Internationale des Tramways et Chemins de fer d’intérêt local en 1897. Il faut dire que les activités de Léon en matière de création d’entreprises de tramways s’étendaient bien au-delà de nos frontières, vu qu’il fut Président ou Administrateur de compagnies de chemins de fer ou de tramways en Argentine, en Autriche, en Italie, en Espagne, en France, en Syrie, en Chine et au Congo. Il présida également divers congrès internationaux, ce qui valut d’importantes commandes de matériel roulant aux constructeurs belges.

Photo de Monsieur Léon Janssen,
issue du fascicule « Tramways Urbains, 1930 »



Lorsqu’il est appelé à occuper le siège de Directeur de la Société Générale laissé libre par le décès de Léon Orban en mars 1905, Léon Janssen accède à la présidence d’une vingtaine de sociétés, où il défend les intérêts de la Société Générale dans le secteur immobilier, ainsi que dans ceux des transports et de l’électricité.



Il faut ici préciser que la Société Générale menait, outre ses activités bancaires, de nombreuses activités industrielles dans les domaines "gourmands en capitaux": l’immobilier, l’énergie (charbon et électricité), la métallurgie et l’exploitation de chemins de fer, et ce tant en Belgique qu’à l’étranger. La Société Générale contrôlait à cette époque près de 40% de l’industrie lourde belge. 


Voici un aperçu (non-exhaustif) des nombreux postes d'administrateur de sociétés que Léon occupe en 1906:

Directeur de la Société générale de Belgique, administrateur de la compagnie générale française de tramways, du chemin de fer des Grands Lacs (Congo), des Tramways Bruxellois, des Railways Liège-Seraing, des Tramways de Turin, de la société générale des Tramways électriques en Espagne, de la compagnie des Bronzes, des Explosifs Favier, des Tramways de Gand, de la société immobilière de Belgique, des chemins de fer du Tessin, des charbonnages de Marchienne, des charbonnages de Monceau-Fontaine et du Martinet, des charbonnages unis de l'Ouest de Mons, des mines du Luhan, de la société bruxelloise d'électricité, des Tramways de Damas, des chemins de fer de l'Est de Lyon et du canal de la Sambre à l'Oise.


Le 15 septembre 1909, Léon rachète le château de Wolvendael (et la propriété de 13 hectares 99 ares 29 centiares qui l’accompagne) à Charles Balser, un banquier d’origine allemande, contre le prix de 600.000 francs. En achetant progressivement les parcelles et les bois avoisinants, il agrandit son domaine (21 hectares 20 ares 44 centiares en 1921) et l’aménage en parc à l’anglaise.

Le Château de Wolvendael - Léon agrandit le bâtiment sur l'aile ouest, ce qui lui fait perdre sa symétrie.
Le bâtiment est actuellement occupé par l'Ecole d'Art de la commune d'Uccle.



Grand amateur d’art (il possède une galerie de 124 tableaux), il fait reconstruire pierre par pierre, à la lisière du parc de son château, un pavillon de style Louis XV découvert à Amsterdam. Il y aménage des salons dans le style des petits appartements de Versailles.

Afin que le domaine ne soit pas morcelé après sa mort, Léon Janssen vend sa propriété en 1921 et pour un prix de 2.379.000 francs à la commune d’Uccle, qui y aménage un parc public. La commune d’Uccle a d’ailleurs complètement restauré le pavillon Louis XV, qui est actuellement exploité en tant que restaurant.


Le Pavillon Louis XV, en 1930 (à gauche) et en 2016 (à droite)


Léon est anobli au titre de baron en date du 5 janvier 1910, par le Roi Albert. Son anoblissement s’accompagne de la création, en 1911 et par la Ville de Bruxelles, d’une « Fondation Baron Janssen » ayant pour objet l’octroi de bourses de 5.000 francs à des étudiants, afin de leur permettre d’entreprendre à l’étranger un voyage d’étude, destiné à parfaire leur éducation et à les aider dans la recherche de nouveaux marchés pour les produits belges.


Léon reprend au pied levé la présidence de l’exposition Internationale de Bruxelles de 1910, suite au décès inopiné du bourgmestre Emile de Mot. Il s’illustre par le dynamisme avec lequel il réussit à rouvrir à bref délai plusieurs sections détruites par un incendie dans la nuit du 14 au 15 août.

L'incendie des 14 et 15 août 1910

Personnalité appréciée du parti socialiste pour sa politique sociale aux Tramways Bruxellois, il est aussi très engagé dans la vie sociale et culturelle du pays. Il est membre des Comités de la Société du Palais des Beaux-Arts et des Amis du Musée. Ce rayonnement n’est pas étranger à sa nomination de vice-gouverneur de la Société Générale de Belgique en 1913, fonction qu’il remplit jusqu’à sa mort en 1923.

Durant la première guerre mondiale, Léon est membre du Comité de Secours et d’Alimentation, du Comité des Invalides de la Guerre, du Comité des orphelins de la Guerre et vice-président de la Mutuelle d’Avances et de Prêts, qui avança près d’un milliard de francs afin d’assurer l’existence de nombreux travailleurs privés de leur traitement.
Le Comité de Secours et d’Alimentation avait été créé en septembre 1914 et était financé par les contributions volontaires d'un petit groupe de financiers et hommes d'affaires auquel appartenait Léon.


La fin de vie de Léon fut assombrie par le deuil de son fils Albert, également Directeur général aux Tramways Bruxellois, qui décède subitement le 18 juillet 1921 à l’âge de 49 ans.

Léon Janssen décède quant à lui à Bruxelles le 26 février 1923 à l’âge de 74 ans. Quant à son épouse, Caroline, elle décède le 27 mai 1926 à l’âge de 75 ans.

1 commentaire:

  1. Hello, merci pour cet excellent article concernant mon arrière grand père, Léon. Je trouve votre blog particulièrement bien fait et très fouillé et documenté. Ceci est vrai pour toutes ses branches!!
    Bonne continuation
    Guy de Broux (ma mère était la fille de Albert, fils de Léon.

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