L'Affaire Philippart - Procès pour prévention d’escroquerie lors de l'émission des actions des Tramways Bruxellois - 1877 (6/7)
LE PROCÈS - AUDIENCE DU 9 AOÛT
M. Janssens, Substitut du Procureur du Roi. Messieurs, s’il n’avait été question en cette affaire que de questions techniques, j’aurais produit ici des témoins plus compétents. Mais le parquet a toujours considéré ce procès comme une question d’appréciation, de bonne foi, de probité, dont l’appréciation est facile.
Voici mon système. Je crois que Philippart a racheté le réseau Vaucamps dans la pensée qu’il y avait 480.000 francs de bénéfices nets acquis en 1874. Il a négocié sous bénéfice de vérification et voulait traiter avec la Banque Belge pour la reprise de l’affaire. Ayant acquis la certitude que le réseau Vaucamps ne produirait pas ce chiffre de recettes, il n’a pas instruit la Banque Belge et ne lui a pas moins endossé l’affaire des Tramways. De là sa participation à la rédaction de la notice incriminée.
Nous avons à examiner quatre points :
1° Les faits convenus dans la notice sont-ils faux ?
2° Philippart a-t-il pris part à la rédaction du prospectus ?
3° Était-il de bonne foi ?
4° A-t-il tenté d’obtenir des souscriptions en publiant des faits mensongers ?
Nous soutenons d’abord que les chiffres sont mensongers et groupés d’une manière perfide. On ne faisait pas 1.800.000 francs de recettes brutes. Il n’y avait pas 3.000.000 de bénéfices. On a tâché de causer chez le public une confusion entre l’obligation et l’action privilégiée.
Y avait-il 1.800.000 francs de recettes brutes et 600.000 francs de bénéfice ? Oui, dans le système de Philippart, qui estimait que l’affaire des Tramways marcherait sur le pied de ces chiffres de bénéfices. Mais l’accusation soutient que Philippart a profité de l’espèce de charade qui se trouve dans la notice pour abuser le public sur la réalité de choses.
Voyons d’abord ce qui concerne l’intervention de Dansaert et Moselli. Philippart voulait que l’affaire produisît un bénéfice net de 40.000 francs par mois pour conclure son marché avec Vaucamps. Il en a écrit à M. l’avocat Joris, son conseil. Il voulait que le revenu fût de 450.000 francs, c’est-à-dire 5 p.c. sur le capital. A cette condition, l’acquéreur consentait le réseau 8 millions.
Vaucamps montra d’abord d’autres exigences, mais plus tard il consentit à une vérification de son matériel sur ses livres pour établir la situation à la fin de l’année 1874. C’est dans ces conditions que M. Joris a établi les préliminaires de la négociation et donné à Philippart un avis pour lequel il n’avait du reste aucune compétence technique. Philippart le reconnaît.
Dans la première entrevue entre les parties, il y a eu un malentendu entre les parties. Philippart croyait à 180.000 francs acquis en 1874. D’après beaucoup, il s’agissait de 180.000 francs qui auraient pu être acquis. Il n’y a pas eu de marchandage.
Le 30 novembre, Philippart dit au Conseil d’Administration de la Banque Belge que l’affaire des Tramways donne un bénéfice sûr de 660.000 francs par an. Le témoin Van Meerbeeck en a déposé. Le témoin de Laveleye déclare de son côté que Philippart lui a donné les chiffres pour la notice comme étant ceux de 1874.
Maître Ed. Picard : La citation n’est pas complète. M. de Laveleye est revenu sur ses déclarations.
M. le Substitut : Je le sais parfaitement. Bien d’autres se sont rétractés quand ils ont eu le mot d’ordre. Mais je recherche l’opinion des témoins alors qu’ils agissaient d’une façon spontanée.
Le Conseil d’Administration de la Banque Belge a cru d’abord que le chiffre de 1.800.000 francs de recettes était acquis et non pas qu’il était possible.
Vient la vérification du tramway Vaucamps par M. l’ingénieur Marsillon. Celui-ci déclare qu’il n’a pas fait de rapport parce que les parties étaient à Bruxelles et qu’il pouvait leur faire verbalement ses communications. M. Vaucamps a refusé de montrer ses livres de compte à M. Marsillon, qui a pris ailleurs ses informations. C’est dans ces conditions qu’a eu lieu aux Bassins Houillers le débat préliminaire entre Vaucamps et Marsillon et que Vaucamps a diminué son prix de 300.000 francs. M. Marsillon n’a reçu aucun honoraire pour son intervention dans la reprise des tramways Morris et Vaucamps.
Le réquisitoire de M. le Substitut est interrompu par l’audition de M. Coumont qui n’a pas encore pu être entendu.
M. Coumont, banquier à Bruxelles déclare qu’une discussion a eu lieu entre MM. Philippart, Joris et lui à propos de l’apport de 480.000 francs fait par M. Philippart pour améliorer le matériel, disait-il, et grossir le dividende. M. Coumont ayant objecté que cela était impossible, M. Philippart a répondu que cet apport servirait à combler un manquant, à parer une insuffisance de recettes.
M. le Substitut : Dans votre pensée, ne s’agissait-il pas au fond d’un dividende ?
M. Philippart : Dans ma pensée, et j’ai dû le dire, cela se trouve du reste dans la rédaction première des statuts, il s’agissait de la réduction des frais d’exploitation et de l’amélioration du matériel actuellement en cours.
M. le Substitut, au témoin : M. Philippart prétend que si l’on a diminué le dividende, c’est parce que l’on a fait le bilan d’une certaine manière. Qu’il y a-t-il de vrai là-dedans ?
R – Il est vrai que les amortissements ont été faits au détriment du dividende, mais ils ont eu lieu dans l’intérêt de la société. Nous continuons de procéder ainsi dans la gestion des Tramways Bruxellois.
M. le Président : En 1875, a-t-on payé les frais d’amélioration d’exploitation, ou seulement les prix d’entretien ?
R – Certaines sommes ont été appliquées à des améliorations.
M. le Substitut reprend son réquisitoire. Il continue l’examen des déclarations de M. Marsillon. Il prétend que cet ingénieur n’a pas eu la pensée de faire une distinction entre le bénéfice réalisé en 1874 et le bénéfice sur le pied duquel on marchait.
C’est de l’avis de M. Marsillon que M. Philippart est parti pour affirmer que les tramways Vaucamps faisaient 480.000 francs de recette par année. Et il prend comme base quatre mois d’exploitation : juillet, août, septembre et octobre qui, en 1874, ont donné les recettes les plus fortes et qui les donnent du reste régulièrement.
Il n’a jamais été question d’une distinction faite par M. Vaucamps dans ses relevés entre une situation normale et une situation anormale.
Je me place pour mon argumentation au point de vue de l’année 1874. Ni M. Vaucamps, ni M. André n’évaluaient les recettes à 1.800.000 francs ; chiffre inexact en tant qu’il représente les recettes de la seule exploitation Vaucamps. M. Philippart a été prévenu de ce fait, il ne pouvait donc pas dire que le réseau donnait un bénéfice normal de 480.000 francs.
M. le Substitut soutient que rien, dans la notice incriminée, n’autorise le lecteur à croire qu’il s’agit d’un bénéfice possible et non d’un bénéfice réalisé. On y dit par exemple : « Les bénéfices actuellement constatés… »
Je sais, dit-il, qu’il y a quelque chose d’ambigu dans le prospectus. C’est la question de savoir s’il fait comprendre dans ce chiffre les recettes brutes l’augmentation sur laquelle on compte pour le moment où certaines améliorations se seront réalisées. C’est une question de bonne foi. Mais je demande au tribunal si, avant les explications de Philippart, il aurait eu l’idée d’interpréter ainsi la notice ?
Des hommes pratiques, compétents, chargés de la chronique financière des grands journaux : MM. E. Lhoest, Mittaux et Duterme, ont compris, comme je le fais moi-même, le chiffre de 1.800.000 francs de recette et l’ont attribuée à l’année 1874.
Il importe au surplus de remarquer que la loi nouvelle punit et qualifié sévèrement ces rédactions ambigües, ces boniments destinés à faire mousser une affaire.
Voici maintenant la déclaration de M. André, qui traite de « boniment » cette notice qui est comme le contrat initial entre le souscripteur et l’administration de la Société des Tramways Bruxellois, et que Philippart, lui, trouve si correcte.
Le système du prévenu consiste, du reste, à se désintéresser complètement de la rédaction de cette notice, rédaction absurde, hybride, inconséquente et de nature à induire le public en erreur.
On m’objectera la déposition de M. Gendebien. Comment M. Gendebien a-t-il pu dire qu’il aurait signé des deux mains cette circulaire amphibologique ? Je laisse au tribunal le soin de l’apprécier.
En toute hypothèse, il est impossible de considérer autrement que comme un chiffre acquis les recettes évaluées dans la notice.
« Tant pis pour les imbéciles qui s’y méprennent ! » vous a-t-on dit à cette audience. Parole Malheureuse ! En tout cas, les prospectus d’affaire devraient être clairement rédigés et mettre ces imbéciles en garde contre eux-mêmes. Imbéciles ! C’est bientôt dit ; mais quand on a besoin d’actionnaires, on pour le vulgum pecus et pour son argent le plus grand des égards.
La notice s’adressait au public, aux petits rentiers, à ceux que la loi protège, et non aux gens d’affaire. L’honorable organe du Ministère public, pour démonter ce fait, donne lecture d’un article publié par l’Echo du Parlement lors de la publication de ce prospectus.
M. le Substitut passe aux fausses appréciations contenues dans la notice. Le prospectus dit qu’il y a 3 millions d’actions ordinaires souscrites, et il fait croire que l’on a actuellement 500.000 francs en revenus. Telle est du moins l’interprétation du Ministère Public, qui s’appuie sur des calculs personnels et incrimine la bonne foi des auteurs de la circulaire.
Quant à la garantie des actions privilégiées, d’après l’orateur, c’était une mauvaise plaisanterie. Quand l’action privilégiée représente tout le capital social, comme dans la société des Tramways Bruxellois, elle devient une action ordinaire.
Je relève en passant, dit M. le Substitut, l’étrange théorie par laquelle M. Philippart proclame la supériorité de l’action privilégiée sur l’obligation. L’obligataire, dit-il, est exposé à voir mangé tout son capital sans pouvoir y faire opposition. La position du porteur d’actions privilégiées est meilleure. Oui, cela est vrai quand on entend les affaires comme M. Philippart. Mais dans les opérations honnêtes et régulièrement faites, l’obligataire est parfaitement garanti.
J’arrive au procès intenté à M. Philippart par un porteur d’action. M. Philippart a transigé. Pourquoi ? Mais évidemment parce qu’il était convaincu de la légitimé des revendications du demandeur. Dans les autres procès, c’est la Banque Belge qui transige. Il n’y a pas eu de pression, de chantage, comme l’a dit M. Philippart. J’espère qu’il rectifiera ce mot et que l’expression a trahi sa pensée.
M. Philippart : Je n’ai pas dit cela positivement. J’ai expliqué ma pensée et que l’on pouvait supposer chez ces actionnaires des intentions de chantage.
M. le Substitut. L’instruction terminée, M. Philippart a compris qu’il devait décliner la responsabilité de la notice. Cette notice, il l’a vue pourtant à un moment où elle pouvait encore être rectifiée. Il devait en suspendre le tirage s’il ne la trouvait pas assez claire. Mais je prétends qu’il y avait préméditation dans le chef du prévenu.
M. Philippart a-t-il agi de mauvaise foi ? Oui, car il a caché à ses collègues le véritable motif pour lequel M. Vaucamps a consenti à une diminution de 300.000 francs sur le prix de son réseau, à savoir un malentendu entre Philippart et Vaucamps relativement au chiffre des bénéfices annuels de l’affaire.
Voilà ce qu’il fallait dire aux administrateurs de la Banque Belge. Mais le prix que l’on donnait était trop élevé, et la diminution consentie était insuffisante.
M. Philippart dit au conseil d’administration de la Banque Belge qu’il a obtenu une diminution de 300.000 francs de M. Vaucamps, parce qu’il y aurait des réparations et des améliorations à apporter au matériel des lignes. Or il n’y avait pas de réparations à faire.
A l’audience, M. Philippart dit que la réduction de prix a été le résultat d’un marchandage.
L’apport des 480.000 francs faits par Philippart devait suppléer à l’insuffisance éventuelle des recettes et à payer le dividende.
M. Philippart donne une autre explication : il devait parer aux frais considérables que devait causer l’exploitation au moment de la reprise du réseau. Cela est inadmissible.
La contre-valeur des 480.000 francs apportés ainsi par les Bassins Houillers était dans les 1.600 actions remises à cette société, et M. Philippart ne l’a jamais ignoré. Il a su que ces 1.600 titres seraient aussi lancés dans le public et que la souscription marchant bien, il serait même remboursé de ses 480.000 francs.
Qu’est-il arrivé de l’exploitation ? M. Philippart tenait à augmenter la recette. Dans ce but, il a augmenté le nombre des voitures. Mais les frais devenant plus considérables, le bénéfice net d’augmentait pas, et Philippart le savait fort bien.
Au résumé, les tramways n’ont pas donné les bénéfices promis. M. Philippart a dit que le bilan avait été mal établi et qu’on avait eu tort de diminuer le dividende. Mais M. Coumont est d’un autre avis.
M. le Substitut termine en accusant M. Philippart d’avoir engagé la Banque Belge à concurrence de 7 millions, dans les autres affaires qu’il dirigeait.
Il ajoute qu’en aucun cas M. Philippart ne pouvait donner au public l’intérêt des 12 millions qu’il lui demandait.
La parole est donnée à la défense.
M. Philippart demande à fournir quelques explications sur les faits avant que ses défenseurs ne plaident la question de droit.
Il explique d’abord sur quoi il a établi ses calculs relativement à la ligne du Bois.
Quant à la notice, M. Philippart tient la première notice, la notice A, pour absolument exacte et loyale, c’est celle-là surtout qu’il a inspirée. Il ne se rappelle pas du reste avoir assisté au conseil d’administration où la notice a été discutée.
Je l’ai déjà dit, ajoute t’il, M. Brugman a attiré mon attention sur la notice. Elle m’a paru absolument correcte, à moi financier habitué au langage des affaires. Sa circulaire a été lancée dans le public sans que personne ne reconnaisse en avoir donné l’ordre. Je n’ai du reste jamais reconnu que cette circulaire était fausse.
Je réservais l’apport de 480.000 francs pour un fond de réserve. Je ne prenais rien sur l’avoir social, et j’étais bien libre, au surplus, d’attribuer aux Bassins Houillers les 1.600 actions que M. le Substitut me reproche de lui avoir remises.
J’ai toujours déclaré bien haut que j’avais l’intention de disposer des capitaux de la Banque Belge pour mes affaires.
M. le Substitut : Cela dit tout.
M. Philippart. Je soignais mes affaires et je veillais ainsi à leurs intérêts. Je n’avais pas à me préoccuper de l’opinion publique.
M. Coumont a dit aujourd’hui que si la nouvelle administration avait changé les allures de l’ancienne, c’est qu’elle avait des intérêts opposés. M. Coumont n’a acheté des actions privilégiées qu’en 1877, et en entrant dans l’administration des Tramways. Il était au contraire gros propriétaire d’actions de dividende. Il avait intérêt à amortir.
M. Michelet, très compétent, M. Coumont, très intéressé, ont fait sur l’année 1875, sur cette année néfaste qui m’amène ici, un travail d’où il résulte une somme de 105.000 francs et une autre somme de 160.000 francs ont été déduites du bénéfice et comptées pour frais.
L’évaluation de l’affaire était exacte, quoi qu’en dise le Ministère public. C’était une belle affaire, et les évaluations ultérieures de M. Coumont dépassent même mes prévisions sous ce rapport. La diminution momentanée des recettes des Tramways provient d’une cause accidentelle, du peu d’accroissement de la population de la capitale, de la crise dont chacun souffre.
Je continue de prétendre que l’action privilégiée des Tramways avait tous les avantages de l’obligation sans en avoir les inconvénients.
J’ai fini.
Maître Ed. Picard débute en constatant que les explications de M. Philippart ont une grande importance au procès et qu’elle dont justice de la prévention.
M. Picard recherche le sens et la portée de l’article 132 de la loi sur les sociétés anonymes, et il se demande si cette disposition s’applique au cas de M. Philippart. La notice peut-elle être attribuée à celui-ci ? A-t-il agi de mauvaise foi? A-t-il voulu tromper le public? C’est ce qu’il faudrait prouver.
L’instruction faite à l’audience a été très favorable au prévenu. C’est un fait important et qu’il convient de faire ressortir.
Le prospectus contient-il des faits faux ? Le Ministère public reconnait lui-même que pour plusieurs mentions de la notice, c’est une question d’appréciation. Les prévisions de M. Philippart étaient justes. Dira t’on que M. Philippart est un trompeur, un escroc ! Qu’on y prenne garde : à ce compte-là, il n’y aurait plus de prospectus possible. Il ne s’agit pas ici d’un faux bilan, mais d’une notice dont les promesses peuvent en partie ne pas se réaliser sans qu’il y ait pour cela un délit dans le fait de l’avoir rédigée.
Pas de trace de mauvaise foi chez M. Philippart. Il avait étudié les chemins de fer et les tramways. Il comprenait que les tramways étaient d’excellentes affaires. Il avait confiance dans les tramways bruxellois.
Le rachat des réseaux Morris et Vaucamps a eu lieu pour le compte des Bassins Houillers et non pour le compte personnel de M. Philippart. L’affaire Morris était brillante. En y joignant le réseau Vaucamps, l’opération devenait moins belle, et si Philippart eût voulu prélever des bénéfices personnels, l’affaire Vaucamps était une maladresse. Mais Philippart ne voyait qu’un but : la concentration des tramways de Bruxelles dans une même main.
M. Picard passe en revue les diverses phases des négociations relatives à la reprise du réseau Vaucamps. Il s’attache à établir que tout s’est passé une façon régulière, naturelle et que le prix n’était pas exagéré. La réduction de prix n’est pas autre chose que le résultat d’un marchandage.
En passant l’affaire à la Banque Belge, la société des Bassins Houillers avait fait son commerce. Elle était créée pour acheter et revendre des affaires.
Les commissions de 50.000 francs accordées par M. Vaucamps à MM. Dansaert et Moselli n’étaient pas hors de proportion avec l’importance du marché.
La Société des Tramways Bruxellois a été fondée par la Banque Belge. Celle-ci a porté les réseaux Morris et Vaucamps pour une valeur plus grande que le prix d’achat, mais qui était d’ailleurs la valeur réelle et représentait un capital sociale de 12 millions.
La mesure relative à un fond de réserve de 480.000 francs avait pour but d’assurer le dividende. Alors où est le délit ?
M. Picard répète que Philippart est resté étranger à la rédaction de la notice. Au surplus, cette notice a été trouvée correcte sous sa première forme par le juge d’instruction lui-même. Cette première forme est la seule que le prévenu ait inspirée. Si la rédaction est ensuite devenue amphibologique, par suite de corrections auxquelles nous sommes restés étrangers, ce n’est pas notre faute.
Si cette notice est justement incriminée, comment se fait-il que l’absent soit seul au banc des prévenus et que ceux dont on trouve l’écriture sur les épreuves ne soient pas là pour répondre d’un fait que pour ma part, je ne trouve aucunement reprochable ? En voyant le prospectus, qui était le commentaire de ses idées, Philippart a dû l’apprécier autrement que le premier venu. Au point de vue de la bonne foi du prévenu, ce point est essentiel.
De même celui devrait croire que les actions privilégiées étaient parfaitement garanties. Si le dividende a diminué, c’est le fait de l’administration nouvelle, qui, d’après M. Philippart, a voulu avantager les porteurs d’actions de dividende. En effet, ceux-ci n’entraient qu’après les actions privilégiées et ordinaires dans le partage des bénéfices et prenaient le risque de ne rien toucher pendant plusieurs années au cas où les recettes seraient trop limitées.
La transaction intervenue aux procès en paiement de dividende n’est même pas un indice de mauvaise foi, puisque le prévenu avait accepté et fait plaider ces procès.
L’abandon de l’instruction judiciaire pendant plusieurs mois prouve combien l’affaire qui nous occupe était douteuse aux yeux des magistrats.
M. le Substitut fait remarquer qu’il n’y a jamais eu à proprement parler d’interruption dans l’instruction.
M. Picard : On l’a abandonnée pendant plusieurs mois. Le défenseur entre dans la discussion des termes de la notice et des corrections qu’on y a faites. Il explique qu’en supposant le caractère délictueux de la pièce, Philippart n’encourait de ce chef aucune responsabilité.
Il n’y a pas eu de mauvaise foi dans l’émission, dans les nombreux achats d’actions privilégiées par les agents de change, dans la publication tardive des statuts, dans l’évaluation de l’ingénieur Marsillon, et le chiffre de 1.800.000 francs auquel la notice évalue les recettes brutes.
M. Picard aborde l’examen des points de droit du procès. La plaidoirie de M. Ed. Picard ne s’est terminée qu’à 6 heures du soir.
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