Dans un précédent article, nous avions abordé brièvement la production et la distribution de l'électricité aux Tramways Bruxellois dans les années 30. Suite à de nombreuses réactions (positives!) et aux nombreuses questions qui m'ont été posées, j'ai approfondi le sujet et je vous le présente à nouveau mais façon "années 20". Le tout est traité sous la forme de 10 "questions - réponses". Allez, c'est parti ^^
1. Comment l’électricité était-elle produite avant la construction de l’usine centrale?
La ligne des boulevards circulaires du haut de la ville et à celle d’Uccle à la Place Stéphanie ont été les deux premières lignes à être électrifiées à Bruxelles, en 1894. La production de l’électricité est assurée par une usine installée dans une partie du dépôt de la rue Brogniez. Cette usine comporte 3 chaudières et 5 groupes électrogènes de 100 kilowatts. En vue de l’alimentation des nouvelles lignes, l’usine de la rue Brogniez est agrandie et on y installe deux groupes électrogènes de 400 kilowatts, deux groupes de 225 kilowatts ainsi que deux nouvelles chaudières.
2. Pourquoi avoir pris la décision de construire une nouvelle usine en 1901 ?
Pour beaucoup de raisons. D’abord, en 1899, la Société des Tramways Bruxellois obtient une concession d’une durée unifiée jusqu’au 31 décembre 1945, avec l’obligation d’appliquer la traction électrique à toutes les lignes de son réseau. La même année, les Tramways Bruxellois récupèrent l’exploitation des lignes du réseau du Chemin de fer à voie étroite de Bruxelles à Ixelles-Boendael, ainsi que les deux usines qui approvisionnaient les lignes de ce réseau en électricité : ce sont les usines d’Ixelles et de Woluwe.
Cependant, même si les Tramways Bruxellois disposent de trois usines, celles-ci sont exiguës et ne peuvent que fort difficilement être agrandies, vu qu’elles sont situées dans des quartiers très habités. Leur ravitaillement en charbon est également problématique. Bref, les Tramways Bruxellois sont obligés de revoir l’approvisionnement électrique de leur réseau. La solution retenue est la construction d’une toute nouvelle usine centrale qui produirait de l’énergie électrique à haute tension (6600 volts) et qui alimenterait les usines déjà existantes, qui seraient alors transformées en sous-stations.
La construction est confiée à une société allemande, l’Union Electricitäts Gesellschaft, dont les conditions avaient été considérées comme les plus avantageuses.
La construction est confiée à une société allemande, l’Union Electricitäts Gesellschaft, dont les conditions avaient été considérées comme les plus avantageuses.
Vue globale de l’usine avec ses deux cheminées et sa grande grue transbordeuse (à l’extrême droite) – © Coll. Mupdofer. |
3. Disposons-nous d'un plan de l’usine ?
L’usine centrale se trouve sur le quai Demets, le long du canal qui relie Charleroi à Bruxelles. Le plan suivant représente l’ensemble de la salle des machines, avec les 5 groupes électrogènes à piston de 1.500 kilovolt-ampères (en haut à gauche), les deux turbo-dynamos (de 4.000 et 6.000 kilovolt-ampères, en haut à droite), le tableau de distribution (tout en haut, au centre), les 9 groupes de deux chaudières (en bas) et les 2 cheminées (tout à gauche et tout à droite).
4. A quoi ressemblait cette salle des machines ?
Pour vous donner une idée, voici une photo des groupes électrogènes à piston de 1.500 kilovolt-ampères...
On notera que tous les appareils à haute-tension avaient été placés dans le sous-sol (pour des raisons de sécurité) et étaient séparés les uns des autres par des cloisons en maçonnerie.
Le voici en photo :
Ce tableau était placé sur une plate-forme et était divisé en 3 parties :
- La première partie comprenait les appareils à basse tension et en courant continu (comme par exemple, les dynamos).
- La seconde partie du tableau comprenait les commandes des interrupteurs à haute tension.
- La troisième partie du tableau comprenait les appareils de mesure, qui sont disposés sur l’avant de la plate-forme et appliqués sur des tubes en cuivre à claire-voie. Ces tubes étaient espacés de 30 centimètres l’un de l’autre, ce qui permettait à l’électricien de suivre tout ce qui se passait dans la salle des machines tout en contrôlant ses appareils.
6. Et les chaudières ?
La salle de chauffe comprenait 10 chaudières en 1903, auxquelles il a été ajouté:
- Trois chaudières qui provenaient de l’usine d’Ixelles
- Trois chaudières qui provenaient de l’usine de la rue Brogniez
- Ainsi que deux nouvelles chaudières.
Ces chaudières étaient disposées en 8 groupes de deux et leur alimentation en eau se fait au moyen de pompes. Deux cheminées de 60 mètres de hauteur et de 3 mètres de diamètre au sommet assuraient le tirage pour toutes les chaudières.
7. Comment le charbon arrivait-il jusqu’aux silos ?
La chaine d’approvisionnement en charbon était des plus modernes (pour l’époque) et était quasiment entièrement mécanisée.
Tout commence au niveau de la grue géante qui assurait le déchargement du charbon, à l’aide d’une benne d’une contenance de 900 kilos. Une fois remplie, la benne était remontée par la grue. Le charbon était déversé sur un tapis roulant de 342 mètres qui longeait toute la partie supérieure des silos. Ces 21 silos avaient la forme de pyramides renversées (avec la pointe vers le bas) et avaient une capacité totale est d’environ 7.000 tonnes de charbon.
Évidemment, les ingénieurs était suffisamment malins que pour avoir prévu un « plan B », en cas d’avarie au tapis roulant de 342 mètres qui desservait les silos : le charbon pouvait aussi être déversé dans une gaine qui conduisait le charbon dans des wagons placés sur une voie de service installée dans la cour.
Évidemment, les ingénieurs était suffisamment malins que pour avoir prévu un « plan B », en cas d’avarie au tapis roulant de 342 mètres qui desservait les silos : le charbon pouvait aussi être déversé dans une gaine qui conduisait le charbon dans des wagons placés sur une voie de service installée dans la cour.
8. Comment le charbon arrive t’il des silos jusqu’aux chaudières ?
En dessous des silos, se trouve un autre système de tapis roulants et de godets, qui apportent le charbon jusqu’au sous-sol de la chaufferie. Les godets (que l’on voit sur la photo ci-dessus) pouvaient être déversés devant n’importe quelle chaudière, avant de passer dans les sous-sols de la chaufferie, pour y récupérer les cendres et à les déverser dans des wagons.
9. A quoi ressemble le réseau des Tramways Bruxellois en 1922 ?
A ceci…
Les installations des Tramways Bruxellois comprennaient 4 sous-stations qui alimentaient chacune séparément une partie du réseau. Les quatre parties du réseau sont isolées électriquement. Le plan ci-dessus montre le réseau complet des Tramways Bruxellois et indique la position des quatre sous-stations.
10. Et les sous-stations ?
La sous-station de la rue Brogniez comprenait six commutatrices, qui pouvaient transformer le courant alternatif à haute tension (6.600 volts) reçu de l’usine centrale en du courant à 410 volts alternatifs ou en du courant à 550 volts continu. Comme chacune de ces 4 sous-stations, la sous-station de la rue Brogniez avait son propre tableau de commande.
La sous-station d’Ixelles comprenait sept commutatrices et deux survolteurs. Cette sous-station a été entièrement modernisée entre 1908 et 1910, afin de généraliser la commande à distance des appareils.
La sous-station de la rue Verte comprenait 6 commutatrices et un survolteur.
La sous-station de la rue Demot comprenait 3 commutatrices et un survolteur. C’était l’installation la plus récente (1913-1914) : tout l’appareillage à haute tension était logé dans des niches en béton d’une galerie située dans les sous-sols du bâtiment. De plus, cette sous-station avait été prévue pour être agrandie et éventuellement accueillir des commutateurs supplémentaires.
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